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Le "printemps arabe" électoralement enterré en Egypte et en Syrie, la Tunisie de Bouazizi tient bon

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Après le maréchal Sissi, élu avec un score à la "Ben Ali" de 96,9%, Bachar Al-Assad fait presque aussi bien avec 88,7% des suffrages. Le "printemps arabe" est désormais enterré dans des urnes lugubres.

L’Egypte est promise à une dictature de longue durée et à la violence, en Syrie, où le régime a repris de l’ascendant sur une opposition éclatée entre djihadistes et "modérés", les pronostics sont encore plus sombres. La Libye, elle, se dirige vers la guerre civile ou la partition entre au moins trois entités. Son sud échappe au contrôle et devient une base de repli des djihadistes, le pays est livré aux milices, le gouvernement, est pratiquement inexistant et un ancien général se croit, en attendant des appuis extérieurs, une destinée nationale.

Le maréchal Sissi a pu compter sur l’appui des monarchies du Golfe – pour qui les Frères Musulmans sont une alternative dangereusement crédible chez elle – qui n’ont pas lésiné sur la dépense pour rétablir le système Moubarak dans toute sa plénitude. Avec l’appui, bruyant, des élites. Bachar Al-Assad a pu compter, lui aussi, sur la détermination de ses soutiens extérieurs, la Russie et l’Iran, pour détromper les analyses des services occidentaux qui ne lui donnaient que quelques semaines.

Les vents démocratiques partis de Tunisie et marqués par une intrusion des citoyens dans la rue pour bousculer les ordres établis ont définitivement reflué sous la conjonction d’une résistance des régimes et des jeux géopolitiques des puissances extérieures. La vague de contestation enclenchée en Tunisie et qui a essaimé dans plusieurs pays arabes s’est estompée, dans le sang le plus souvent.


Partout, et en Algérie notamment, le discours de la "stabilité" qui suggère que le changement est un danger refleurit. "L’immobilisme" est présenté comme une vertu face aux dangers potentiels – inévitables – qui accompagnent un changement de régime. Il est vrai aussi que la rente pétro-gazière, en déclin en Algérie, et le souvenir encore vivace d’une transition ratée peuvent donner de la consistance à ce discours. Mais le coût de l’immobilisme avertissent tous les experts sera payé encore plus cher. La Libye a vraiment servi de repoussoir en Algérie.

Des marqueurs

L’opinion populaire s’est enflammée pour la révolution tunisienne, elle a été refroidie par la séquence libyenne jugée "inauthentique" et suscitée de l’extérieur. La Tunisie et la Libye sont devenues les marqueurs opposés de la vertu du changement ou non. Le discours de la "stabilité" du pouvoir algérien s’appuie lourdement sur le désordre libyen. Mais pour l’opposition algérienne, diverse et qui tente laborieusement de se fédérer, la Tunisie est l’argument du changement.

La Tunisie est précieuse pour l’Algérie. Dans l’absolu, bien sûr, on est, par l’histoire et la culture, un même pays. Mais aussi parce qu’elle apporte, encore, la démonstration que l’échec de la transition démocratique en 1988 et son basculement dans la guerre civile, n’étaient pas une fatalité. La transition tunisienne a beau avoir été chaotique, elle se fait, comparativement à celle ratée par l’Algérie, à des couts minimes.


Il est vrai qu’Ennahda d’aujourd’hui n’a rien à voir avec le FIS et que la transition tunisienne s’est faite après une défaite consommée du régime avec la fuite de Ben Ali. Vu d’Algérie, Rached Ghannouchi est un homme politique qui a su tirer tous les enseignements possibles du ratage algérien. Les Algériens peuvent désormais apprendre des tunisiens.

Le changement provoque nécessairement des résistances mais il peut être mené avec un minimum de casse quand les forces politiques et sociales acceptent les compromis qui permettent d’avancer. Si aujourd’hui la Tunisie fait figure d’exception, c’est parce qu’on n’y a pas renoncé au changement. Et elle apporte, en comparaison avec l’Egypte et la Syrie ou d’autres, la preuve que le refus du changement est plus couteux que le changement.

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