A en croire les gros titres de la presse étrangère ces jours-ci, l'absence de la charia dans le projet de Constitution tunisienne tiendrait presque du miracle. Les Frères musulmans d'Egypte n'avaient-ils pas, dans la Constitution de 2012, imposé la loi islamique comme source principale de la législation?
Les deux amendements à l'article 1 visant une similaire introduction de la charia ont été reboutés dès le premier jour.
Le Monde note que les débats avancent "cahin-caha", mais qu'ils avancent. Plusieurs médias étrangers ont mis en exergue le caractère "unique" dans le monde arabe de certains articles adoptés. Pas si unique que ça, pourraient s'exclamer les autres Constitutions de ce "monde arabe". L'occasion de comparer quelques points qui rassemblent (ou divisent).
Le tout premier article de ce qui pourrait devenir la nouvelle Constitution tunisienne entretient le flou autour du rôle de l'Islam. " La Tunisie est un État libre, indépendant et souverain, l'Islam est sa religion": religion du pays (la Tunisie) ou religion de l'Etat tunisien?
Sur ce point, les voisins maghrébins sont nettement plus clairs.
L'article 1 de la Constitution marocaine (datant de 2011) dispose ainsi que "l'Islam est la religion de l'Etat", tout comme l'article 2 de la Constitution algérienne (1996).
Vers l'Est, la Libye attend encore sa nouvelle Constitution, prévue pour août 2014. En Egypte, un projet de Constitution est destiné à remplacer celle votée sous le gouvernement de Mohamed Morsi. A l'instar du Maroc et de l'Algérie, cette dernière proclame également l'Islam religion de l'Etat.
"Gardien de la religion", l'Etat tunisien "garantit la liberté de conscience et de croyance et le libre exercice du culte". Adopté dès le premier jour des débats, l'article 6 est qualifié de "disposition exceptionnelle dans le monde arabe" par Le Monde.
Le royaume chérifien, partie intégrante du "monde arabe", "garantit à tous le libre exercice des cultes" (art. 1) sans pour autant assurer la liberté de conscience, qui désigne à la fois la liberté de religion et la liberté par-rapport à la religion.
Mais pas si vite. La Constitution algérienne précise que "la liberté de conscience et la liberté d'opinion sont inviolables" (Art. 36). L'ex-Constitution égyptienne, pourtant rédigée sous domination des Frères musulmans, qualifie quant à elle d' "inviolable" la " liberté de croyance". L'Etat y garantit notamment "le droit de pratiquer ses rites religieux" (Art. 43).
Article 7 de la Constitution tunisienne: "La famille est la cellule fondamentale de la société et l’État doit assurer sa protection".
Rarement ignorée, la famille est souvent encensée dans les Constitutions des pays d'Afrique du Nord, même si chacun y va de ses priorités.
A l'instar de la Tunisie, la famille marocaine - "fondée sur le lien du mariage" - est également "la cellule de base de la société". En Algérie, elle bénéficie "de la protection de l'Etat et de la société" (Art. 58).
Les Egyptiens ne sont pas sans restes. "Fondation de la société", la famille se base sur "la religion, la moralité et le patriotisme".
L'article 20 aura généré de vives discussions. La Constitution y dispose que "les citoyens et les citoyennes, sont égaux en droits et devoirs. Ils sont égaux devant la loi sans discrimination aucune".
Ni une, ni deux, l'AFP, reprise par de nombreux médias étrangers, qualifie le texte d' "unique dans le monde arabe", même si "l'égalité des sexes n'y est pas clairement énoncée".
Mais ce même "monde arabe" ne cesse de surprendre.
L'article 6 de la Constitution marocaine précise ainsi que "tous, personnes physiques ou morales, y compris les pouvoirs publics, sont égaux devant [la loi] et tenus de s'y soumettre".
"Tous" serait un terme trop vague dans le jargon juridique? Le même article dispose que "les pouvoirs publics oeuvrent à la création des conditions permettant de généraliser l'effectivité de la liberté et de l'égalité des citoyennes et des citoyens". Il fallait juste le préciser.
Toujours au Maroc, "l'homme et la femme jouissent, à égalité, des droits et libertés à caractère civil, politique, économique, social, culturel et environnemental". L'article 19 va jusqu'à faire mention des conventions et pactes internationaux ratifiés par le Royaume.
Du côté de l'Algérie, "les citoyens sont égaux devant la loi", sans discrimination "de naissance, de race, de sexe, d'opinion..."(Art. 29). Sans oublier "les citoyens et citoyennes" de vigueur, dont "l'égalité en droits et devoirs" serait une finalité des institutions.
Même les Egyptiens y sont allés d'un bon sentiment égalitaire. Les "citoyens" y sont "égaux devant la loi" et ont "des droits identiques", "sans discrimination".
Les voisins de la Tunisie sont visiblement passés sous le radar de nombreux médias étrangers. Les dispositions "uniques" de la Constitution tunisienne, bien que souvent uniques dans leur formulation exacte, sont loin d'être uniques dans le sens susceptible de leur être conféré.
En attendant la fin des débats tunisiens, la comparaison avec les Constitutions en vigueur dans les alentours souligne également qu'une Constitution n'est rien sans son application. En Algérie, où le président Abdelaziz Bouteflika a été réélu avec 90% des voix en 2009, l'article 10 de la Constitution dispose que "le peuple choisit librement ses représentants".
Les deux amendements à l'article 1 visant une similaire introduction de la charia ont été reboutés dès le premier jour.
Le Monde note que les débats avancent "cahin-caha", mais qu'ils avancent. Plusieurs médias étrangers ont mis en exergue le caractère "unique" dans le monde arabe de certains articles adoptés. Pas si unique que ça, pourraient s'exclamer les autres Constitutions de ce "monde arabe". L'occasion de comparer quelques points qui rassemblent (ou divisent).
A qui l'Islam?
Le tout premier article de ce qui pourrait devenir la nouvelle Constitution tunisienne entretient le flou autour du rôle de l'Islam. " La Tunisie est un État libre, indépendant et souverain, l'Islam est sa religion": religion du pays (la Tunisie) ou religion de l'Etat tunisien?
Sur ce point, les voisins maghrébins sont nettement plus clairs.
L'article 1 de la Constitution marocaine (datant de 2011) dispose ainsi que "l'Islam est la religion de l'Etat", tout comme l'article 2 de la Constitution algérienne (1996).
Vers l'Est, la Libye attend encore sa nouvelle Constitution, prévue pour août 2014. En Egypte, un projet de Constitution est destiné à remplacer celle votée sous le gouvernement de Mohamed Morsi. A l'instar du Maroc et de l'Algérie, cette dernière proclame également l'Islam religion de l'Etat.
Liberté de conscience et de culte
"Gardien de la religion", l'Etat tunisien "garantit la liberté de conscience et de croyance et le libre exercice du culte". Adopté dès le premier jour des débats, l'article 6 est qualifié de "disposition exceptionnelle dans le monde arabe" par Le Monde.
Le royaume chérifien, partie intégrante du "monde arabe", "garantit à tous le libre exercice des cultes" (art. 1) sans pour autant assurer la liberté de conscience, qui désigne à la fois la liberté de religion et la liberté par-rapport à la religion.
Mais pas si vite. La Constitution algérienne précise que "la liberté de conscience et la liberté d'opinion sont inviolables" (Art. 36). L'ex-Constitution égyptienne, pourtant rédigée sous domination des Frères musulmans, qualifie quant à elle d' "inviolable" la " liberté de croyance". L'Etat y garantit notamment "le droit de pratiquer ses rites religieux" (Art. 43).
La famille dans la société
Article 7 de la Constitution tunisienne: "La famille est la cellule fondamentale de la société et l’État doit assurer sa protection".
Rarement ignorée, la famille est souvent encensée dans les Constitutions des pays d'Afrique du Nord, même si chacun y va de ses priorités.
A l'instar de la Tunisie, la famille marocaine - "fondée sur le lien du mariage" - est également "la cellule de base de la société". En Algérie, elle bénéficie "de la protection de l'Etat et de la société" (Art. 58).
Les Egyptiens ne sont pas sans restes. "Fondation de la société", la famille se base sur "la religion, la moralité et le patriotisme".
Tous plus ou moins à peu près égaux
L'article 20 aura généré de vives discussions. La Constitution y dispose que "les citoyens et les citoyennes, sont égaux en droits et devoirs. Ils sont égaux devant la loi sans discrimination aucune".
Ni une, ni deux, l'AFP, reprise par de nombreux médias étrangers, qualifie le texte d' "unique dans le monde arabe", même si "l'égalité des sexes n'y est pas clairement énoncée".
Mais ce même "monde arabe" ne cesse de surprendre.
L'article 6 de la Constitution marocaine précise ainsi que "tous, personnes physiques ou morales, y compris les pouvoirs publics, sont égaux devant [la loi] et tenus de s'y soumettre".
"Tous" serait un terme trop vague dans le jargon juridique? Le même article dispose que "les pouvoirs publics oeuvrent à la création des conditions permettant de généraliser l'effectivité de la liberté et de l'égalité des citoyennes et des citoyens". Il fallait juste le préciser.
Toujours au Maroc, "l'homme et la femme jouissent, à égalité, des droits et libertés à caractère civil, politique, économique, social, culturel et environnemental". L'article 19 va jusqu'à faire mention des conventions et pactes internationaux ratifiés par le Royaume.
Du côté de l'Algérie, "les citoyens sont égaux devant la loi", sans discrimination "de naissance, de race, de sexe, d'opinion..."(Art. 29). Sans oublier "les citoyens et citoyennes" de vigueur, dont "l'égalité en droits et devoirs" serait une finalité des institutions.
Même les Egyptiens y sont allés d'un bon sentiment égalitaire. Les "citoyens" y sont "égaux devant la loi" et ont "des droits identiques", "sans discrimination".
Les voisins de la Tunisie sont visiblement passés sous le radar de nombreux médias étrangers. Les dispositions "uniques" de la Constitution tunisienne, bien que souvent uniques dans leur formulation exacte, sont loin d'être uniques dans le sens susceptible de leur être conféré.
En attendant la fin des débats tunisiens, la comparaison avec les Constitutions en vigueur dans les alentours souligne également qu'une Constitution n'est rien sans son application. En Algérie, où le président Abdelaziz Bouteflika a été réélu avec 90% des voix en 2009, l'article 10 de la Constitution dispose que "le peuple choisit librement ses représentants".
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