
ACCORD - Ils ont maintenu leurs grèves du 28 et du 31 décembre. Les médecins, pharmaciens et chirurgiens dentistes affiliés au Syndicat indépendant des médecins du secteur public (SIMSP) n’ont pas renoncé à leur démarche protestataire. Pourtant, avec le ministère de la Santé, ce dernier est bien arrivé à un accord dans lequel la majorité des revendications de cette catégorie professionnelle est prise en compte. D’ailleurs le département de Anass Doukkali publie, ce lundi, un communiqué dans lequel il précise qu’il a été convenu avec le SIMSP de poursuivre le dialogue social dans lequel il est question en premier lieu d’améliorer les conditions de travail de ces médecins. Leur revendication d’application de l’indice-échelon 509 (Bac+8) dans le calcul du salaire des médecins est prise en compte dans cet accord, tandis que celui de leur accorder deux grades hors échelles sera soumis à l’étude.
Dans ce même accord, le ministère s’engage également à accélérer le versement des indemnités liées à la garde, l’astreinte et la responsabilité, mais aussi à continuer, dans le cadre d’un comité mixte, l’étude d’autres points. Ces derniers portent sur la révision du décret relatif à la garde et l’astreinte et sur une valorisation du statut de la médecine générale.
“Satisfait ou pas satisfait? Je n’en sais rien. C’est un accord sur des principes qui devra se concrétiser sur le terrain”, déclare au HuffPost Maroc le Dr Abdellah El Mountadar Alaoui, secrétaire général national du SIMSP. Pour ce dernier, le plus important à retenir à ce stade, “c’est que le ministère approuve la majorité de nos revendications et que nous en discuterons point par point avec réalisme”. L’activation des revendications sera le baromètre de satisfaction au SIMSP. “Le 21 décembre 2005, nous avions signé un accord avec l’ancien ministre Houcine El Ouardi, un accord resté lettre morte”, regrette le SG nationale du syndicat.
Militantisme, recours ultime. Ces médecins s’y sont remis pour se faire entendre. “Nous avons gaspillé du temps et de l’énergie pour rien ou presque, ces dernières années. Et nous avons bien peur, aujourd’hui, de nous retrouver dans la même situation”, confie-t-il. A coup de grèves successives, les médecins ont crié leur détresse et de plus en plus tout au long des 18 derniers mois. “Et ce malgré les difficultés à mener nos grèves parce que le gouvernement nous a sanctionné collectivement et de manière démesurée par des prélèvements allant du tiers à la moitié du salaire”, s’indigne-t-il.
En plus des grèves, ces médecins du secteur public ont marqué cette année par des démissions collectives massives. “Nous avons observé une vingtaine de grève au cours d’un an et demi passé, nous avons porté des blouses noires et nous avons aussi déposé des démissions collectives. Ce que nous demandons ne relève pas d’un luxe mais d’une légitimité”, souligne le Dr Abdellah El Mountadar Alaoui.

Le compromis avec le ministère de la Santé ne veut pas dire tourner la page. “Les démissions sont toujours sur la table, elles sont maintenues et d’autres nous parviennent encore”, prévient le SG national du syndicat. D’après ce dernier, la majorité des démissions individuelles sont en quête de validation dans les tribunaux. Tandis que les collectives concernent, elles, 50 médecins dans l’Oriental, 30 dans la région de Ouarzazate et 130 dans la région de Casablanca. Au bord de la crise, les médecins du secteur public mette le département de tutelle devant un choix: “soit concrétiser nos revendications, soit accepter de nous libérer”.
Toutefois, le SIMSP précise qu’il ne cherche pas à “mettre à mort le secteur public de la santé”. “Nous voulons rester au service du citoyen, mais comment peut-on le faire si les conditions et les moyens de travail manquent?”, s’interroge-t-il. Et d’insister sur le fait qu’il y a “une grande affluence et trop de pression qui finissent par endommager le matériel dans les hôpitaux. Du coup, on est obligé de renvoyer le patient lorsque la radio est en panne ou lui donner un rendez-vous pour une opération dans plusieurs mois”, fait-t-il remarquer, estimant qu’à l’instar du patient “le médecin est aussi une victime”.
Doléances adressées au gouvernement, il est temps, d’après le syndicat, de passer à la phase de “redonner espoir” aux médecins du public. “Nous ne baisserons pas la garde. Pour que les principes de l’accord se concrétisent, il faudra s’armer de patience, certainement, mais nous attendons à ce que la présidence du gouvernement donne un signal positif”, espère le SG national du syndicat.
L’espoir fait vivre les ambitions des médecins publics. En quête de reconnaissance à tous les niveaux, ils estiment tout aussi légitime que leur profession soit sur le même pied d’égalité que les autres spécialités de la médecine. La commission mixte devra examiner d’ailleurs cette proposition du SIMSP, comme l’indique le communiqué du ministère. “Il s’agit de valoriser la médecine générale et prendre en considération qu’elle est un pivot incontournable de la santé des citoyens en lui accordant le même statut que les autres spécialités”, explique le Dr Abdellah El Mountadar Alaoui.
Le ministère de la Santé estime que les deux parties font preuve de prise de conscience dans le contexte actuel dans lequel la réforme du système de santé est une priorité. Dictée par le roi Mohammed VI, cette dernière porte sur “le redressement des anomalies qui entachent l’exécution du programme de couverture médicale RAMED et de la refonte en profondeur du système national de santé”. Le 7 novembre dernier, lors d’une audience avec le chef du gouvernement Saad-Eddine El Othmani et le ministre de la Santé Anass Doukkali, le souverain a été clair sur le besoin d’accélérer la cadence de la réforme.