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Lutte antiterroriste et libertés: Le dilemme de la Tunisie

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Des mosquées et des médias menacés de fermeture, l'armée considérée comme une "ligne rouge": une attaque contre des militaires tunisiens a déclenché une offensive de l'Etat contre les appels au jihad, saluée par beaucoup mais vue par certains comme risquant de rétablir la censure.

A la suite de l'assaut attribué à des jihadistes qui a tué 15 soldats le 16 juillet sur le mont Châambi, à la frontière algérienne, les autorités ont décidé "la fermeture immédiate" des mosquées tombées aux mains de radicaux et se trouvant hors du contrôle du ministère des Affaires religieuses.

Le gouvernement a également annoncé la fermeture des radios et télévisions devenues des "espaces pour le takfir (l'acte de déclarer une personne infidèle, ndlr) et l'appel au jihad", en affirmant désormais considérer l'armée et la police comme "des lignes rouges".

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Pour les autorités, il s'agit de rétablir le "prestige" et "l'autorité" d'un Etat affaibli depuis la révolution qui a renversé le régime autoritaire de Zine El Abidine Ben Ali en janvier 2011, ainsi que de tenter de contrôler le discours "extrémiste" qui a pu proliférer dans un paysage audiovisuel en plein chantier, où de nombreuses radios et télévisions opèrent sans licence.

Selon une source au gouvernement, 13 mosquées ainsi qu'une radio religieuse, Nour, ont déjà été fermées.

Mais des voix se sont élevées pour mettre en garde contre une régression des libertés chèrement acquises après la dictature, et réclamer un équilibre entre le droit à l'information et la lutte antiterroriste.

"Refus des lignes rouges"

"Le pays vit un moment très difficile et les politiciens sont dans l'urgence", dit à l'AFP Rachida Ennaifer, membre de l'instance de l'audiovisuel tunisien, la HAICA.

"Mais la lutte contre le terrorisme ne doit pas passer par l'arbitraire ou le populisme. Si on veut un Etat de droit, il faut respecter la loi", ajoute-t-elle, en affirmant que la décision du gouvernement de fermer une radio et une chaîne pirates n'avait pas été prise en coordination avec l'instance, contrairement à ce qu'ont affirmé les autorités.



Le président du Syndicat national des journalistes tunisiens (SNJT), Néji Bghouri, a de son côté indiqué à l'AFP "refuser toute ligne rouge". "Comment interpréter cette expression? Si demain un journaliste veut enquêter sur une affaire de corruption au sein de l'armée ou de la police, que se passera-t-il?", s'est interrogé M. Bghouri, d'après qui la solution est dans "l'autorégulation" des médias même si, reconnaît-il, cette dernière prendra du temps au vu de l'inexpérience de ceux-ci. Le syndicat a d'ailleurs réuni plusieurs médias la semaine dernière pour mettre au point une "charte" devant régir la couverture des évènements liés au terrorisme, afin notamment de bannir l'apologie du terrorisme après plusieurs dérapages au cours de l'année écoulée.

Quant à la décision de fermer les mosquées "hors-la-loi", elle a aussi suscité des réactions partagées. "Je considère que la décision de fermer des mosquées est mauvaise parce qu'elle va ajouter au soutien populaire pour les terroristes (...). Changer les imams hors-la-loi, voilà la solution", a estimé Mohamed Ben Salem, un haut responsable du parti islamiste Ennahdha, majoritaire à l'Assemblée, sur la télévision privée Hannibal.



"Il n'est pas facile de récupérer une mosquée", a répondu le ministre des Affaires religieuses, Mounir Tlili, sur la radio privée Shems FM, en évoquant la réaction souvent "violente" des personnes occupant ces lieux de culte.

M. Tlili s'est malgré tout voulu rassurant, affirmant que "les mosquées appartiennent aux fidèles". "Nous ne reviendrons pas aux pratiques d'avant la révolution", a-t-il assuré.

Mais pour certains, que la lutte antiterroriste fasse passer les droits de l'Homme au second plan n'est pas source d'inquiétude. Un discours qui trouve un écho chez de nombreux Tunisiens inquiets de la menace djihadiste.

"Qu'on ne vienne pas me parler de droits de l'Homme", a ainsi lancé au lendemain de l'attaque l'imam très médiatisé Férid el-Béji."Nous sommes dans une guerre pour notre existence. Celui qui parle de droits de l'Homme en ce moment est complice du terrorisme", a-t-il ajouté sur un plateau de la télévision privée Nessma, sans qu'aucun des invités présents le contredise.


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