
STYLE - Visage des campagnes Louboutin depuis déjà deux saisons, le Marocain Amine Messaoudi séduit la toile avec sa silhouette longiligne et sa maîtrise parfaite du corps. Égérie des campagnes “Loubi in Progress” et “Rankich”, représentant respectivement les collections automne-hiver et printemps-été 2018, le jeune danseur de 25 ans, qui a fait ses débuts dans les rues de Casablanca, nous raconte l’histoire de son parcours atypique qui l’a propulsé parmi les figures artistiques les plus en vue du moment.
Et ce n’est pas sans raison que la marque à la semelle rouge a tout misé sur le Marocain. Un visage atypique, un regard perçant, une longue chevelure obscure qu’il porte un peu comme une signature, Amine Messaoudi ne répond à aucun standard. Le jeune danseur qui a fait ses premiers pas dans la mode sur le podium de la maison française Carven SS17 lors de la Fashion Week parisienne, revient sur ses collaborations avec Christian Louboutin.

Né à Casablanca où il a vécu jusqu’à ses 18 ans, c’est dans les rues de la ville blanche qu’Amine Messaoudi découvre la danse. “Je suis Marocain d’origine berbère du Moyen Atlas, mes parents sont de la région de Khnifra. C’est le baccalauréat en poche que j’ai décidé de partir en France pour poursuivre des études en Qualité logistique industrielle, que j’ai suivies pendant deux années”, raconte-t-il au HuffPost Maroc.
“Comme je n’ai pas pu concilier mes études et ma passion pour la danse, j’ai décidé de quitter les bancs de l’université, pour venir m’installer à Marrakech, où j’ai commencé à donner des cours de danse et à travailler dans le domaine artistique, pour des pubs, des émissions télé. Un choix qui n’a pas été facile à expliquer à mes parents”, se souvient le jeune danseur qui se définit comme un pur produit de l’école publique marocaine.
“C’est à Marrakech que j’ai commencé à m’impliquer encore plus dans ma passion. J’ai notamment travaillé pour le film ‘Les nouvelles aventure d’Aladin’ avec Kev Adams et Jamel Debbouze. À ce moment-là, je savais ce que je voulais faire. J’étais sûr de vouloir poursuivre mon rêve. J’ai donc décidé de reprendre mes études mais cette fois dans la culture artistique”, précise Amine, qui suit actuellement une licence d’art et de recherche en danse à l’université de Lille.
J’aime cette richesse que l’on retrouve dans le patrimoine marocain. Je trouve que la jeunesse ne fait pas d’effort pour découvrir la culture du pays"
“Ma passion pour la danse a commencé au Maroc. Je dansais dans la rue, un peu comme la plupart des danseurs marocains. Il faut savoir que c’est assez compliqué pour les jeunes de prendre des cours de danse au Maroc, d’abord parce que cela coûte trop cher, mais aussi parce que la plupart des écoles d’art sont situées dans des les beaux quartiers donc réservées à la classe aisée”, souligne le danseur, ajoutant que paradoxalement, “les quelques danseurs marocains qui arrivent à vivre de leur passion viennent en majorité de la rue. “Je pense notamment au photographe Yassine Alaoui Ismaili alias Yoriyas, (qui a débuté dans la danse avant d’arrêter à cause d’un blessure au genoux, ndlr) , ou encore au breakdancer Fouad Ambelj alias Lil Zoo, qui a atteint la finale au championnat du monde de Breakdance et qui fait partie aujourd’hui des super stars de Red Bull pour les sport extrêmes”, poursuit Amine, qui se souvient de ses pistes de danses improvisées dans les rues de Casablanca.
Refusant de se plier au règles des castings et des catalogues humains, c’est un peu part hasard qu’Amine Messaoudi s’est retrouvé dans l’univers très fermé de la mode et du luxe. “Comme je suis assez grand, avec une allure svelte, les chorégraphes m’ont souvent proposé de m’inscrire dans des agences pour travailler dans la mode, mais je n’y ai jamais vraiment pensé. En réalité, c’est la mode qui est venue vers moi. J’avais été repéré par une agence de talents qui avait aimé mon travail lors d’un show. C’est comme ça que j’ai fait mon premier défilé pour Carven en juin 2016, lors de la Fashion Week printemps-été 2017, à Paris. C’était ma première expérience en tant que mannequin danseur. Il s’agissait d’un show a mi-chemin entre le défilé de mode et le spectacle de danse”.
L’histoire de la collaboration avec Louboutin, est également le fruit d’un heureux hasard. “Il n’y a eu ni casting, ni agence, ni rien, simplement une belle rencontre. L’assistant de la directrice artistique de la marque était présent à l’un de mes spectacles, lui-même a une troupe de danse qui s’appelle House Of Drame, et nous avions fait un show ensemble au Montenegro. Quelques semaines plus tard, il m’a recontacté pour me proposer de travailler sur une nouvelle campagne”, précise Amine. “L’équipe artistique de la marque souhaitait changer l’image un peu trop sexy, parisiennes et sensuelles de la marque pour une image plus jeune, ouverte, plus fraîche. D’où cette nouvelle campagne très sport, qui casse avec l’image très ‘cabaret parisien’ que véhicule le marque sans vraiment le vouloir”.

Très attaché à sa culture berbère et nord africaine, le jeune Marocain aime jouer avec les codes des danses ancestrales des tribus marocaines. “J’aime cette richesse que l’on retrouve dans le patrimoine marocain. Je trouve que la jeunesse ne fait pas d’effort pour découvrir la culture du pays. Je pense particulièrement aux artistes que se sont un peu détournés de leur patrimoine pour se tourner vers l’Europe, les États-Unis ou l’Asie. Lors du dernier défilé Caftan par Femmes du Maroc, j’ai revisité les danses de Reggada, de Ahidouss et Houara. J’ai tenu à collaborer avec des danseurs étrangers pour leur faire découvrir et réinterpréter ces danses ethniques marocaines J’étais aussi curieux de voir ce que cela allait donner dans leur écriture corporelle, leur interprétation... Et le résultat était merveilleux.”
Pour ses prochains projets, Amine confie ne rien planifier et se laisser porter au gré des rencontres. Comme le hasard fait bien les choses, on ne doute pas un instant de le retrouvera très bientôt associé à une nouvelle aventure placée sous le signe de la danse ou de la mode.
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