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Qui est Edouard Philippe, le nouveau premier ministre français?

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POLITIQUE - "Si c'est Macron, ce qui ne me semble pas certain, il devra rassembler à droite, et il sera probablement en mesure de le faire". L'auteur de ces lignes quasi-prophétiques, rédigées un mois avant le premier tour de l'élection présidentielle, se nomme Edouard Philippe. Écarté de la course élyséenne par l'élimination prématurée de son champion Juppé, le quadragénaire avait accepté de tenir une chronique dans le journal français Libération. Une intrusion dans la presse "gauchiste" qui lui offrait un strapontin présidentiel sans se commettre dans la campagne du rival Fillon. Ce qu'il ignorait probablement au moment où il écrivait ces mots, c'est qu'il était lui-même appelé à devenir la pierre de voûte du rassemblement macronien à droite.

A 46 ans, le député-maire Les Républicains du Havre, dans le nord-est de la France, nommé lundi 15 mai vers 15h, heure française, après une matinée d'attente interminable, est assurément le premier ministre le plus inattendu de la Ve République.

Celui qui avait remisé ses rêves de ministère après la défaite de son mentor à la primaire de la droite et du centre s'apprêtait à dire au revoir à l'Assemblée nationale pour se concentrer sur sa ville. Il va finalement abandonner les deux pour rejoindre Matignon et Emmanuel Macron au sommet de l'Etat.

Une "transgression" majeure pour ce cadre du parti de droite franaçsi, Les Républicains, devenu une prise de guerre, lui qui a fait toute sa carrière politique à droite dans l'ombre d'Alain Juppé et d'Antoine Rufenacht. Le premier fut son guide sur la scène nationale, l'appelant à ses côtés pour créer l'UMP au début des années 2000. Le second lui a mis le pied à l'étrier au Havre en lui offrant sa première place éligible en 2001 puis les clés de la ville neuf ans après; il quitte alors son poste de directeur des Affaires publiques du géant du nucléaire Areva qu'il occupait depuis 2007.

Seize ans plus tard, voilà Edouard Philippe bombardé premier premier ministre d'un chef de l'Etat "chamboule-tout", qu'il n'a même pas soutenu au premier tour de l'élection présidentielle et qui n'est même pas sûr de disposer d'une majorité d'ici cinq semaines.

Un énarque libéral avide de liberté

Dans la recomposition générale de l'échiquier politique qui s'annonce, le pari d'Edouard Philippe est audacieux, pour ne pas dire improbable. En succombant aux sirènes de Matignon, cet énarque petit-fils de docker, fils d'enseignants qui a gravi un à un les échelons de la droite gaulliste pour se tailler un fief dans une ville portuaire historiquement de gauche, prend aujourd'hui le risque de tout perdre: ses amis politiques évidemment, contre lesquels il va devoir batailler aux législatives, sa ville peut-être et sûrement l'essentiel de la crédibilité qu'il a patiemment bâtie dans l'écurie des juppéistes.

Il s'en doute, les coups vont pleuvoir. Mais cela n'a pas l'air d'effrayer cet amateur de boxe encore peu connu du grand public qui se définit avant tout comme un littéraire épris de liberté. "Je ne sais pas si je suis optimiste ou pessimiste, mais je sais que je suis libéral. Je pense que c'est la liberté qui compte", confiait-il à son ami d'enfance "gauchiste" Laurent Cibien qui lui a consacré un étonnant documentaire baptisé "Edouard mon pote de droite", diffusé en août dernier sur la chaîne publique France3.


On y découvre un Edouard Philippe bosseur et malin, soucieux de gommer son image d'apparatchik bon élève dans sa ville ouvrière en écoutant du rock et en siphonnant des bouteilles de coca. Prudent et peu enclin aux confidences, il livre malgré tout dans ce documentaire sa conception de la politique, entre convictions profondes, pragmatisme habile et stratégie de la gagne.

"Quand vous faites de la politique, vous devez avoir en permanence le souci de bien gouverner et le souci de gagner. Il y a un aspect politicien à toute chose, mais si vous n'avez que l'aspect politicien, vous êtes des merdes. Les gens qui ne pensent qu'aux aspects politiciens ne comptent pour rien. Les gens qui ne pensent qu'aux aspects de fond, ce sont de belles âmes, mais comme ils ne gagnent pas, on en a un peu rien à foutre".

Voilà pour le cours de réalisme politique.

Sa mission: arracher l'aile gauche de l'UMP aux Républicains

Alors que la rumeur de sa nomination à Matignon n'a cessé d'enfler dans la semaine qui a suivi le second tour de la présidentielle, cet éphémère rocardien (il a eu sa carte au PS pendant deux ans) récupéré par la droite orléaniste s'est amusé à préparer le terrain. Si Macron osait transgresser la ligne de démarcation gauche-droite en nommant un LR à Matignon, "alors la situation politique serait nouvelle, parce que le fait politique serait nouveau, et je ne vois pas comment on peut répondre par avance à quelque chose qui n'a jamais été proposé".

Pas dupe, Edouard Philippe doit savoir que le destin du quinquennat se joue maintenant et que l'Histoire s'écrit avec lui. Ce n'est pas seulement la plume du Havre mais l'aile libérale et progressiste au grand complet que le président Macron espère arracher à l'ex-UMP pour compléter sa majorité aux prochaines législatives.

Pour l'auteur de L'heure de vérité, coécrit avec son ami Gilles Boyer, un autre juppéiste du premier cercle, le noeud est gordien. Faut-il se cramponner à la famille des Républicains où se côtoient européens convaincus (comme lui) et souverainistes patentés, progressistes ouverts au mariage pour tous (comme lui) et partisans affichés de l'abrogation de la loi Taubira? Ou bien faut-il prendre le train En Marche!, au risque de se retrouver seul à bord?

Gilles Boyer n'a pas manqué de souligner que son camarade avait toutes les qualités pour être premier ministre. Mais sous la pression des Républicains qui l'ont investi dans une circonscription favorable des Hauts-de-Seine, le même a dû s'engager à ne pas pactiser avec le président de la République et son chef de gouvernement (voir ci-dessous).

"De quoi Macron restera-t-il le nom? D'une révolution manquée ou d'une victoire éclair? D'une trahison misérable ou d'une ambition démesurée? Personne ne peut le dire aujourd'hui", s'interrogeait Edouard Philippe dans Libération début janvier. Une interrogation qu'il peut désormais s'adresser à lui-même.








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