ISLAMABAD - Peu de gens ont porté attention à la nouvelle bibliothèque dans cette école islamique pour filles, près de la capitale pakistanaise, avant que certains remarquent l'affiche en ourdou sur la porte en bois: «Bibliothèque d'Oussama ben Laden, le Martyr».
Maulana Abdul Aziz, imam radical qui dirige l'école Jamia Hafsa, voulait rendre hommage à la mémoire du leader d'Al-Qaïda, tué en mai 2011 par une brigade spéciale américaine alors qu'il se cachait à Abbottabad, à 125 km de la capitale, Islamabad.
Le nom de la bibliothèque a retenu l'attention au Pakistan, où l'opinion publique reste fortement anti-américaine, et où les étudiants religieux louangent encore l'homme derrière les attentats du 11 septembre.
Il reste toutefois que depuis quelques années, l'image de Ben Laden n'est plus aussi présente qu'avant: les Pakistanais ont vu des milliers des leurs tués dans la guerre face aux talibans, et ont de moins en moins de tolérance pour le militantisme radical.
Au fur et à mesure que les autorités du pays ont arrêté des leaders talibans et des acolytes de Ben Laden, la population est devenue craintive de montrer son effigie, et ses représentations existantes ont été laissées à l'abandon, usées par le soleil ou emportées par des pluies torrentielles.
L'imam Aziz a ramené son nom dans l'espace public car il le considère comme une figure emblématique, a dit son porte-parole, Tehsin Ullah. «Aziz considère Oussama ben Laden comme un héros et un martyr, c'est pourquoi il a donné son nom à la bibliothèque.»
Il y a des dizaines de milliers d'étudiants dans des écoles religieuses au Pakistan, un pays où les musulmans sont majoritaires. La plupart fournissent gratuitement chambre, pension et même frais de scolarité aux étudiants des coins plus éloignés du pays. Certaines des écoles servent aussi à radicaliser les étudiants, pour qu'ils deviennent des militants.
L'imam Aziz dirige la prière à la Mosquée rouge d'Islamabad, assaillie en 2007 par les forces du président d'alors, Pervez Musharraf; l'armée a tué des dizaines d'extrémistes, ce qui a mené à une série de représailles des militants un peu partout au Pakistan.
La bibliothèque de l'école Jamia Hafsa occupe une pièce près d'une salle d'ordinateurs et du bureau du directeur. Il ne semblait pas y avoir de livres sur ben Laden ou de portraits de lui quand l'Associated Press a visité les lieux, vendredi. Abdul Rehman, directeur de l'école, a dit qu'on y trouvera seulement des livres portant sur les enseignements de l'islam.
M. Rehman n'a pas voulu parler de ben Laden, disant que les jeunes filles de l'école apprenaient aussi des notions d'ordinateur. Il n'a pas voulu que les journalistes s'adressent aux étudiantes, disant que l'islam ne permet pas aux hommes d'interagir avec les étudiantes ou les professeures, à moins qu'ils ne fassent partie de leur famille.