Tarte au citron meringuée ou shoot d'amphétamines, pour votre cerveau cela pourrait bien être du pareil au même. Dans une étude publiée ce mardi 15 avril, une équipe de chercheurs du CNRS met en avant l'action de certains corps gras appelés triglycérides sur la zone du cerveau intervenant dans le circuit de la récompense. Exactement comme dans le cas de la dépendance à certaines drogues.
Cette découverte éclaire d'un jour nouveau certains comportements compulsifs, mais aussi le phénomène complexe de l'obésité. Car si l'obésité commence dans l'assiette, on sait qu'elle se poursuit dans la tête. Ces dernières années, plusieurs études ont souligné le rôle joué par certaines zones du cerveau dans la mécanique de la prise de poids. C'est par exemple le cas de l'hypothalamus qui intervient notamment dans la régulation de la sensation de faim.
Mais ici, c'est à une autre zone cérébrale que les chercheurs se sont intéressés, le noyau accumbens (Nac). Pourquoi? Principalement en raison de sa capacité à détecter les graisses, ce qui est surprenant pour cet organe qui consomme essentiellement du sucre.
"Ce qui nous a interrogés, c'est la présence d'une enzyme capable de décomposer les triglycérides, des lipides principalement issus de notre alimentation, dans le noyau accumbens," explique au HuffPost le biologiste Serge Luquet, qui a dirigé cette étude.
Alors pour quelle raison le noyau accumbens (Nac) est-il capable de produire cette enzyme et les graisses pourraient-elles être "senties" dans le Nac? C'est donc à cette question qu'ont voulu répondre les chercheurs de l'Unité de Biologie fonctionnelle et adaptative (BFA) de l'Université Paris-Diderot.
Croquettes et cacahuètes
Pour savoir ce que cette enzyme faisait là, ils ont soumis des souris à plusieurs tests. Au cours d'une première expérience, les rongeurs avaient le choix entre une croquette au sucre et à la cacahuète (l'équivalent pour rongeurs d'un bon gueuleton), et une croquette standard plutôt insipide.
Comme l'homme, toute souris qui se respecte préfère se diriger vers un bon plat plutôt que vers un aliment sans intérêt. Et pour avoir accès à la friandise, les rongeurs devaient actionner un petit levier, tâche dont ils s'acquittaient sans sourciller.
Mais lorsque les chercheurs ont injecté des triglycérides directement dans le cerveau des souris, elles étaient soudainement moins motivées, bougeaient moins, et équilibraient leur alimentation entre les deux sources alimentaires proposées, celle riche qui était riche en graisse, et l'autre qui l'était moins. "Quelque chose leur dit qu'elles sont satisfaites", résume Serge Luquet. Comme la drogue qui vient parasiter l'ensemble du comportement, il semblerait donc que les triglycérides aient le même effet sur le cerveau.
Et pour vérifier que c'est bien le cas, les chercheurs ont réduit au silence le gène codant la fameuse enzyme dans la zone concernée.
Résultat, plus de décomposition des triglycérides dans le noyau accumbens des souris, et surtout un changement de comportement radical. Motivées, les souris témoignent alors d'un appétit très important pour la bonne croquette, et elles en redemandent. C'est ce qu'on appelle un comportement hyperphagique, le même que celui que l'on retrouve chez certaines personnes en surpoids.
Une diminution de la présence de cette enzyme dans le Nac, siège ou s'élabore la récompense, provoque donc bien un comportement qui pourrait conduire à l'obésité, preuve que les triglycérides influencent le comportement des souris. Moins ils sont présents dans le cerveau, plus la souris a envie de nourriture riche. Plus elle y est exposée, moins la souris est motivée. Rien que de logique puisque la souris a le sentiment d'être rassasiée.
Cercle vicieux
Mais que se passe-t-il lorsque la souris est habituée à manger gras et sucré, un peu comme quelqu'un qui se nourrirait de fast-food et de barres chocolatées à longueur de journée? Son exposition aux triglycérides augmente, sa motivation est toujours diminuée, mais pas son appétit pour des nourritures riches. Au cours d'exposition fortes et longues, les chercheurs ont effet remarqué que la souris s'habituaient. Le résultat: des souris flemmardes qui voudraient s'en mettre plein la panse sans faire le moindre effort.
Ça vous rappelle quelque chose? Le phénomène pourrait être le même pour les humains. Exposés à une nourriture grasse, notre motivation diminue, seul demeure notre quête de plaisir, et donc d'aliments gras et sucrés. "Ça ressemble à l'effet d'une consommation de plus en plus importantes de drogues," analyse Serge Luquet, "la consommation doit s’accroître pour provoquer un plaisir identique."
Évolution et French paradox
Quant à savoir pourquoi notre cerveau est sensible à ces lipides, la réponse pourrait bien venir de l'évolution. Loin de vivre dans une société d'abondance, nos ancêtres pourraient avoir eu besoin de ce système de récompense à l'origine du plaisir, de l'apprentissage et de la motivation pour survivre. "Lorsque l'on consomme une nourriture grasse, les triglycérides pourraient agir dans le cerveau pour renforcer ces trois dimensions grâce au système de récompense," poursuit le chercheur.
"L'apport des triglycérides vers le cerveau, à heure fixe et en adéquation avec l'horloge interne d'un organisme et peut être un élément important de ce dialogue entre apport alimentaire, c'est-à-dire le fait d'avoir mangé et le cerveau" conclut Serge Luquet. Peut-être peut-on voir là l'une des clefs de compréhension du French paradox, qui veut qu'en dépit d'une alimentation grasse et salée, les Français et leurs trois repas par jour soient moins enclins au surpoids que les Américains... à l'alimentation moins structurée.
Cette découverte éclaire d'un jour nouveau certains comportements compulsifs, mais aussi le phénomène complexe de l'obésité. Car si l'obésité commence dans l'assiette, on sait qu'elle se poursuit dans la tête. Ces dernières années, plusieurs études ont souligné le rôle joué par certaines zones du cerveau dans la mécanique de la prise de poids. C'est par exemple le cas de l'hypothalamus qui intervient notamment dans la régulation de la sensation de faim.
Mais ici, c'est à une autre zone cérébrale que les chercheurs se sont intéressés, le noyau accumbens (Nac). Pourquoi? Principalement en raison de sa capacité à détecter les graisses, ce qui est surprenant pour cet organe qui consomme essentiellement du sucre.
"Ce qui nous a interrogés, c'est la présence d'une enzyme capable de décomposer les triglycérides, des lipides principalement issus de notre alimentation, dans le noyau accumbens," explique au HuffPost le biologiste Serge Luquet, qui a dirigé cette étude.
Alors pour quelle raison le noyau accumbens (Nac) est-il capable de produire cette enzyme et les graisses pourraient-elles être "senties" dans le Nac? C'est donc à cette question qu'ont voulu répondre les chercheurs de l'Unité de Biologie fonctionnelle et adaptative (BFA) de l'Université Paris-Diderot.
Croquettes et cacahuètes
Pour savoir ce que cette enzyme faisait là, ils ont soumis des souris à plusieurs tests. Au cours d'une première expérience, les rongeurs avaient le choix entre une croquette au sucre et à la cacahuète (l'équivalent pour rongeurs d'un bon gueuleton), et une croquette standard plutôt insipide.
Comme l'homme, toute souris qui se respecte préfère se diriger vers un bon plat plutôt que vers un aliment sans intérêt. Et pour avoir accès à la friandise, les rongeurs devaient actionner un petit levier, tâche dont ils s'acquittaient sans sourciller.
Mais lorsque les chercheurs ont injecté des triglycérides directement dans le cerveau des souris, elles étaient soudainement moins motivées, bougeaient moins, et équilibraient leur alimentation entre les deux sources alimentaires proposées, celle riche qui était riche en graisse, et l'autre qui l'était moins. "Quelque chose leur dit qu'elles sont satisfaites", résume Serge Luquet. Comme la drogue qui vient parasiter l'ensemble du comportement, il semblerait donc que les triglycérides aient le même effet sur le cerveau.
Et pour vérifier que c'est bien le cas, les chercheurs ont réduit au silence le gène codant la fameuse enzyme dans la zone concernée.
Résultat, plus de décomposition des triglycérides dans le noyau accumbens des souris, et surtout un changement de comportement radical. Motivées, les souris témoignent alors d'un appétit très important pour la bonne croquette, et elles en redemandent. C'est ce qu'on appelle un comportement hyperphagique, le même que celui que l'on retrouve chez certaines personnes en surpoids.
Une diminution de la présence de cette enzyme dans le Nac, siège ou s'élabore la récompense, provoque donc bien un comportement qui pourrait conduire à l'obésité, preuve que les triglycérides influencent le comportement des souris. Moins ils sont présents dans le cerveau, plus la souris a envie de nourriture riche. Plus elle y est exposée, moins la souris est motivée. Rien que de logique puisque la souris a le sentiment d'être rassasiée.
Cercle vicieux
Mais que se passe-t-il lorsque la souris est habituée à manger gras et sucré, un peu comme quelqu'un qui se nourrirait de fast-food et de barres chocolatées à longueur de journée? Son exposition aux triglycérides augmente, sa motivation est toujours diminuée, mais pas son appétit pour des nourritures riches. Au cours d'exposition fortes et longues, les chercheurs ont effet remarqué que la souris s'habituaient. Le résultat: des souris flemmardes qui voudraient s'en mettre plein la panse sans faire le moindre effort.
Ça vous rappelle quelque chose? Le phénomène pourrait être le même pour les humains. Exposés à une nourriture grasse, notre motivation diminue, seul demeure notre quête de plaisir, et donc d'aliments gras et sucrés. "Ça ressemble à l'effet d'une consommation de plus en plus importantes de drogues," analyse Serge Luquet, "la consommation doit s’accroître pour provoquer un plaisir identique."
Évolution et French paradox
Quant à savoir pourquoi notre cerveau est sensible à ces lipides, la réponse pourrait bien venir de l'évolution. Loin de vivre dans une société d'abondance, nos ancêtres pourraient avoir eu besoin de ce système de récompense à l'origine du plaisir, de l'apprentissage et de la motivation pour survivre. "Lorsque l'on consomme une nourriture grasse, les triglycérides pourraient agir dans le cerveau pour renforcer ces trois dimensions grâce au système de récompense," poursuit le chercheur.
"L'apport des triglycérides vers le cerveau, à heure fixe et en adéquation avec l'horloge interne d'un organisme et peut être un élément important de ce dialogue entre apport alimentaire, c'est-à-dire le fait d'avoir mangé et le cerveau" conclut Serge Luquet. Peut-être peut-on voir là l'une des clefs de compréhension du French paradox, qui veut qu'en dépit d'une alimentation grasse et salée, les Français et leurs trois repas par jour soient moins enclins au surpoids que les Américains... à l'alimentation moins structurée.
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